Interview // Gabrielle Gauthey, Senior vice-présidente Carbon Neutrality Businesses, Total
LES CONSÉQUENCES DE LA CRISE DU COVID
Total est confronté à trois crises parallèles qui constituent un puissant accélérateur des changements : la crise du pétrole, la crise environnementale et la crise du Covid. En dix ans, le palmarès des plus grosses capitalisations boursières du secteur de l’énergie a été bouleversé sous l’effet de la transition énergétique.
Plusieurs phénomènes se sont agrégés avant la crise du Covid : la chute des cours du pétrole; le combat de certaines ONG contre les compagnies pétrolières; la pression des actionnaires pour le respect de l’Accord de Paris destiné à limiter le réchauffement climatique; l’arrêt du financement des énergies carbonées par certaines banques; le refus des compagnies d’assurance de couvrir certaines activités industrielles; la pression des salariés et des futures recrues en faveur d’un environnement décarboné.
La crise du Covid a accéléré la baisse de la consommation d’hydrocarbures ainsi que les investissements dans les nouvelles activités. Désormais, l’ambition de Total est de faire partie des cinq plus grands producteurs mondiaux d’énergies renouvelables. Pour atteindre cet objectif, Total est confronté au défi de la transformation de son modèle en société mul- ti-énergies.
LA TRANSITION ÉNERGÉTIQUE
Total a adopté une stratégie en faveur de l’énergie responsable. D’une part, le groupe a pris des engagements en matière de décarbonation concernant ses installations, ses processus industriels et sa consommation d’énergie. Pour atteindre la neutralité carbone, Total compte moderniser ses installations en les électrifiant, lutter contre les fuites de méthane, générer des crédits carbone par la plantation d’arbres et la séquestration de carbone dans le sous-sol. Total s’est fixé l’objectif de réduire de 60% l’intensité carbone de ses produits d’ici à 2050. Cependant, l’entreprise ne peut pas s’engager à la place de ses clients et des autres industries productrices de carbone, et c’est pour cela que c’est dans les zones où les gouvernements prennent des mesures que Total s’engage plus globalement : ainsi engagement de neutralité carbone de ses scopes 1, 2 et 3 à horizon 2050 en Europe.
D’autre part, les investissements de Total dans l’électricité bas carbone s’élèvent à 2 milliards de dollars par an. Total a récemment investi dans le photovoltaïque en Espagne, dans des projets éoliens offshore en Grande-Bretagne, en Corée du Sud… Total compte massivement augmenter la production d’énergies renouvelables afin d’atteindre une capacité de 35GW (giga-watts) en 2025 et de 85GW en 2030, ce qui correspond à un niveau supérieur à la production nucléaire d’EDF.
La mutation du modèle énergétique de Total en faveur des énergies renouvelables et bas carbone est très largement entamée. En 2019, le mix énergétique de Total était composé de 55 % de pétrole, 40 % de gaz et 5 % d’énergie renouvelable. En 2030, il sera profondément modifié avec 35% de pétrole, 50 % de gaz naturel et 15 % d’énergie renouvelable. Ainsi, dans dix ans, les énergies bas carbone représenteront les deux- tiers des ventes de Total.
La transformation d’une compagnie pétrolière comme Total est un processus de longue haleine, ce qui explique l’impression de lenteur dans l’évolution des business models.
LE RÔLE DES TECHNOLOGIES
Les progrès technologiques constituent un atout essentiel pour réduire l’empreinte carbone des entreprises. Dans le cadre de sa mutation, Total a l’ambition de développer des activités neutres en carbone.
GreenFlex est une filiale de Total spécialisée dans l’impact environnemental. GreenFlex propose une plateforme d’amélioration de la performance énergétique, environnementale et sociétale. Sa mission consiste à faire changer les entreprises de trajectoire vers une économie sobre et réparatrice. GreenFlex accompagne déjà 750 clients pour intégrer la création de valeur environne- mentale et sociale au cœur de leur activité. Concrètement, GreenFlex aide les entreprises industrielles à se décarboner et à transformer leurs processus les plus polluants.
Par ailleurs, Total développe des puits de carbone industriels et naturels. Les technologies dites CCUS (carbon capture, usage and storage) permettent de capter le carbone à la sortie des usines ou des raffineries, de le liquéfier, puis de l’injecter dans des puits de carbone au fond de la mer du Nord. Les puits de carbone naturels permettent de séquestrer du carbone dans des projets agricoles et forestiers de conservation et de régénération).
Le secteur du numérique est également concerné par la transition énergétique et doit se décarboner. La plupart des grands acteurs du numérique s’intéressent aux processus de décarbonation et aux investissements dans les puits de carbone. Enfin Total utilise largement le numérique pour le développement de ses activités de décarbonation, notamment l’optimisation des champs solaires et de la distribution énergétique.
Total investit aussi dans de nouveaux modes de mobilité douce et durable qui souvent se sur basent sur des plateformes numériques qui optimisent la distribution auprès des clients.
L’INTERVIEWÉ
GABRIELLE GAUTHEY
Senior vice-présidente Carbon Neutrality Businesses
Total
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