Le Togo dans la spirale de la dépendance numérique
Alors que le Togo accélère sa transition numérique avec la création de l’Agence Togo Digital en 2022 et le lancement de sa stratégie Togo Digital 2025, un nouveau chapitre s’est ouvert en termes de coopération avec le Kazakhstan et la Chine. Cette semaine, un accord avec le géant chinois des télécommunications, Huawei, a été signé par la ministre en charge du commerce, Rose Kayi Mivedor-Sambiani. L’objectif du gouvernement est « d’accélérer l’inclusion sociale et le développement économique par le numérique » à travers 9 programmes structurants et complémentaires, parmi lesquels nous comptons l’accès au très haut-débit et à l’équipement pour tous ou encore l’accès aux services sociaux de base pour inclure toutes les populations.
Derrière les discours sur l’inclusion sociale et le développement économique, se cachent de sérieux enjeux de souveraineté. En s’alliant à Huawei, le Togo s’engage dans une dépendance technologique qui pourrait s’avérer à double-tranchant. Les équipements chinois, aussi performants soient-ils, sont souvent associés à des risques pour la sécurité nationale. Plusieurs axes de la stratégie digitale sont ainsi des points très sensibles de la gestion de données : la dématérialisation des flux financiers de l’Etat ou l’identification nationale biométrique. Comment garantir que les données des Togolais ne seront pas exploitées à des fins commerciales ou politiques ? Comment s’assurer que les technologies utilisées ne serviront pas à restreindre les libertés individuelles ?
Par ailleurs, cette dépendance peut influencer le développement d’un écosystème numérique local. Tout en en misant sur des solutions clé en main fournies par des multinationales, le Togo doit poursuivre le développement de sa propre industrie numérique. Plusieurs initiatives ont été lancées par le gouvernement, notamment NanaTech, destinée aux femmes entrepreneuses togolaises, pour former les citoyens au numérique. Les enjeux sont imminents et les apprenants d’aujourd’hui ne seront pas au cœur des décisions stratégiques nationales avant quelques années.
La souveraineté numérique est une préoccupation grandissante au sein des gouvernements du monde entier en particulier depuis l’arrivée de l’IA générative et prédictive. ActeursPublics avait ainsi organisé un grand débat sur la souveraineté numérique en mai dernier où Réussir sa transformation numérique tout en assurant la souveraineté de ses données, de ses opérations et de ses applications était la problématique centrale. L’urgence numérique est bien là mais les conséquences de la dépendance numérique sont à bien mesurer.
Car la dépendance numérique, c’est un peu comme toute addiction : facile à prendre, difficile à quitter.
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