Interview // Hélène Valade, Directrice développement environnement, LVMH
LES CONSEQUENCES DE LA CRISE DU COVID
La crise provoquée par la pandémie a accéléré des tendances sociétales qui étaient déjà présentes, notamment autour de préoccupations environnementales et de transition énergétique. Portés par les jeunes générations, ces enjeux participent de l’attractivité en entreprise des jeunes talents, qui ont un très haut niveau d’exigence dans ce domaine.
Il ne suffit pas de vendre du rêve aux jeunes générations pour les séduire et les fidéliser. Elles demandent aussi aux marques de revendiquer une utilité sociale. C’est ce capital de confiance dans les entreprises que la crise a permis de faire émerger qui est aussi déterminante pour les clients et avec lequel il va falloir compter désormais.
Les enjeux environnementaux sont devenus majeurs pour toutes les entreprises. Mais en ce qui concerne LVMH, c’est dès 1992, peu après le Sommet de la Terre à Rio, que le Groupe s’est inscrit dans une démarche de développement durable et a été l’un des premiers à créer une direction de l’Environnement.
Par la suite, dans une volonté de s’appuyer sur la science, LVMH a développé des partenariats avec des organismes de recherche sur la biodiversité et le climat. Le Groupe a été pilote pour la préparation du protocole de Nagoya, l’accord international sur la biodiversité adopté en 2010 et a participé à la création du bilan carbone avec l’ADEME.
L’APPROCHE DE LVMH (SUR LE CLIMAT)
Le groupe LVMH s’inscrit dans la transition énergétique avec le programme « LIFE 2020 », qui présente des engagements datés et chiffrés en matière de climat et de réduction des émissions de gaz à effets de serre. À titre d’exemple, LVMH a augmenté la part du renouvelable dans son « mix » énergétique et a installé des systèmes d’éclairage spécifiques utilisant des LED dans ses boutiques.
Le Groupe prépare un nouveau programme environnemental dans lequel un coup d’accélérateur sera donné sur ces thèmes, avec des engagements forts sur l’ensemble de la chaîne de valeur (ce que l’on appelle le scope 3).
Après avoir concentré ses efforts sur ses sites de production et sur ses magasins, LVMH se focalise désormais sur les éléments tels que les matières premières, le transport des produits, avec davantage de maritime et de routier… Le bilan carbone du Groupe est faible, mais nous avons un devoir d’exemplarité.
DES ENGAGEMENTS FORTS DANS LE DOMAINE DE LA BIODIVERSITE
En effet, tous les produits de luxe (qu’il s’agisse de mode, de maroquinerie, des parfums & cosmétiques, de montres & joaillerie, de vins & spiritueux) fabriqués par les marques du Groupe – Louis Vuitton, Christian Dior, Berluti, Loro Piana, Fendi, Guerlain, Bulgari… – proviennent de la nature. Il s’agit de lui rendre ce qui lui a été pris.
C’est pourquoi LVMH met en place des programmes de conservation avec des partenaires comme l’UNESCO et met en œuvre des initiatives ciblées, autour de pilotes d’agriculture régénératrice, ou avec par exemple l’exploita- tion du coton avec des fertilisants naturels. Une agriculture Haute Couture !
La bataille porte aussi sur la crédibilité d’indicateurs environ- nementaux lisibles. Il faut la même robustesse sur des données financières qu’extra-financières.
Si tous les acteurs du luxe bougent dans le même sens, ces initiatives sont susceptibles de changer la donne pour la filière en matière d’empreinte carbone.
L’EVOLUTION DES BUSINESS MODELS
L’expérience et l’usage étaient déjà au cœur de la définition même de luxe, qui incarne naturellement une notion de durabilité. L’économie de la réparation fait partie du business model du luxe. On peut décliner des services de relookage de souliers, de recyclage de vêtements, de réutilisation du verre. Il nous faut pousser le plus possible le modèle de l’économie circulaire, de la circularité créative. C’est aussi une source d’inspiration pour les designers.
L’expérience client est également au cœur du luxe. L’un des défis pour les marques est de trouver une alchimie heureuse entre les boutiques et le commerce en ligne. Les expériences sur les canaux numériques se perfectionnent et reproduisent ce que les clients vivent dans nos magasins. Certaines technologies permettent aux vendeurs de parler en face à face avec leurs clients, tout en étant à distance.
Le développement durable, ce sont des progrès en continu, rien n’est jamais parfait. Aujourd’hui, en partie grâce aux jeunes générations, y compris en Chine, ces enjeux sont intégrés au sein des entreprises, ils font partie intégrante du business. Comme toute transformation, cela génère de la résistance, mais l’important est d’en comprendre la nature, de donner lieu à de vrais débats dans la recherche de solutions, et à une communication active sur nos initiatives en interne comme en externe pour embarquer le plus grand nombre et aboutir à un véritable changement de l’ensemble de la filière.
L’INTERVIEWÉ
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