Interview // Véronique Karcenty, Directrice de l’environnement digital des salariés, Orange

12 février 2021

LA CRISE DU COVID

Lors du choc de la crise du Covid, Orange a d’abord mis à l’abri tous ses collaborateurs conformément aux recommandations sanitaires. En parallèle, Orange a favorisé le déploiement et l’usage des outils destinés à faciliter le travail à distance.

La crise a démontré qu’il était possible de placer toutes les populations de salariés éligibles au travail à distance en télétravail. Sur le plan technique, le basculement a bien fonctionné, notamment grâce aux outils collaboratifs comme la visioconférence et à un VPN bien dimensionné.

LA REMISE EN CAUSE DE L’ORGANISATION

Le premier sujet qui est apparu pendant la crise concerne le rôle du management dans un contexte de gestion des équipes à distance. L’être humain est un animal social qui a besoin de rencontrer ses pairs. La créativité collective est in- dispensable au développement de l’entreprise. Or, un certain nombre d’échanges informels sont devenus compliqués en raison de la distanciation imposée par le confinement.

La crise du Covid interroge le fonctionnement d’un collectif. Elle pose des questions sur l’évolution du travail, rendu plus difficile par l’absence de contacts physiques. Le rôle du ma- nager, la place du contrôle et de la confiance sont remis en cause. De quel type de managers les entreprises ont-elles besoin avec le développement du télétravail ? Comment recréer le lien entre les collaborateurs et le management ?

Le deuxième sujet concerne la gestion des collaborateurs et la nécessité de fixer les règles du nouveau mode de fonctionnement alternant présentiel et distanciel. Paradoxalement, la sortie du confinement a été plus compliquée à gérer que la crise elle-même. Le retour des équipes dans les bureaux a été délicat et certains collaborateurs ont dû être remotivés.

Après une période où beaucoup de salariés ont été amenés à prendre davantage d’initiatives et d’autonomie, il est important de rappeler que c’est l’entreprise qui définit l’organisation du travail et non le salarié en fonction de ses propres contraintes.

Enfin, la crise a montré la difficulté d’intégrer les nouvelles recrues lorsqu’une partie des contacts informels a disparu. Créer du relationnel uniquement par écran interposé est un exercice complexe pour les jeunes collaborateurs qui débutent leur vie professionnelle.

L’ESSOR DU TELETRAVAIL

Il est important de ne pas tirer trop vite les conclusions des changements en cours. Le télétravail est un outil d’organisation au service de l’entreprise. Certaines sociétés ne sont pas favorables au télétravail à plein temps. Elles considèrent qu’au-delà de deux à trois jours de télétravail par semaine, le risque d’isolement est important. Et que les salariés risquent d’être moins engagés si le sentiment d’appartenance à l’entreprise se perd.

Avant la crise du Covid, 20 % des salariés d’Orange avaient signé une convention de télétravail dans le cadre d’un accord pouvant aller jusqu’à 3 jours par semaine pour les activités éligibles. Après le confinement, les enquêtes internes montrent que 70% des salariés d’Orange aime- raient travailler à distance.

Outre le cadre de ce nouveau mode de fonctionnement, il convient de réfléchir à l’équipement des collaborateurs en télétravail et à leur environnement.

LES ENSEIGNEMENTS DE LA CRISE

Avant la crise du Covid, l’obstacle au télétravail n’était pas la capacité des réseaux ou l’équipement en ordinateurs. Les réseaux des opérateurs étaient prêts, comme cela a été démontré pendant la pandémie. Le principal blocage était psychologique. Les managers voulaient voir leurs collaborateurs et ces derniers voulaient être vus par leur hiérarchie. En quelques semaines, une révolution des mentalités s’est produite et le regard sur le travail a changé. Le confinement a bousculé les habitudes et a obligé les managers à formuler des objectifs professionnels plus précis et dissociés de la présence. Les entreprises ont également été amenées à faire le tri pour se focaliser sur les tâches essentielles à la poursuite de l’activité. La pandémie a libéré une réserve de productivité avec l’utilisation massive des technologies.

LA TRANSITION ENERGETIQUE

La démarche d’Orange consiste à tendre vers la sobriété numérique pour ses propres besoins. D’une part, Orange a décidé de limiter le nombre d’équipements par salarié et a mis en place des circuits de reconditionnement des ordinateurs et des téléphones mobiles afin de favoriser une seconde vie des matériels.

D’autre part, la diminution de l’empreinte carbone passe par l’enseignement des bonnes pratiques et des manières d’utiliser les outils technologiques dans le but de consommer moins d’énergie. Un travail doit être accompli sur les usages, les comportements individuels et la responsabilisation des citoyens.

L’INTERVIEWÉ

VÉRONIQUE KARCENTY
DIRECTRICE DE L’ENVIRONNEMENT DIGITAL DES SALARIÉS, ORANGE

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