Comment les établissements financiers investissent pour gagner en performance opérationnelle ?

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Un article de Julien DUGUÉ, Associé, TNP, paru dans le livre blanc « Comment réussir le sursaut de l’Europe ? ».

Une chute de rentabilité depuis 10 ans qui s’accélère

Après un fort rebond post covid, les banques françaises ont globalement enregistré de mauvais résultats en 2023-2024 avec un effet ciseau impactant : croissance du PNB faible (-40 % de production de crédit immobilier en 2022-2023,…) et hausse conséquente des coûts (+10 % entre 2016 et 2024). Le coefficient d’exploitation (CoEx) moyen des activités de banque de détail des banques françaises atteint un niveau record à 76 %, contre 64 % en 2013, les reléguant à la 15ème et dernière position parmi les 15 principaux pays européens.

Même les banques historiquement très rentables sont impactées et ont lancé des plans de performance/d’excellence opérationnelle pour se relancer, notamment sur leur métier de banque de détail, les investisseurs attendant une rentabilité comparable à leurs homologues européens.

C’est une nouvelle ère de performance qui s’ouvre après celle des grandes transformations des années 2000 à 2020 autour de la mise en place/centralisation des middle et back office, et l’avènement du digital et de la rationalisation du SI (qui représente toujours une dépense majeure pour les banques).

Certains évènements du secteur bancaire interpellent

  • Le modèle de banque universelle est mis en débat : quel équilibre définir entre couverture de service et rentabilité de l’établissement ?
  • Un modèle pour les banques en ligne difficile à rentabiliser et pérenniser, avec comme témoin les fins d’activité d’ING, d’Orange Bank et de Ma French Bank en 2023/2024.
  • Des acteurs neobank ou fintech de plus en plus solides et atteignant désormais leur point d’équilibre (et dont la valorisation de certaines dépassent même celle des établissements historiques) en sortant de la logique du « tout gratuit » vers un modèle freemium.
  • Le recentrage d’activité de certains acteurs avec la vente de leurs actifs dans certains territoires à l’étranger (vente de Bank of the West par BNP Paribas, vente des réseaux africains en cours par la Société Générale).

Une démarche simple… mais complexe à décliner

Les indicateurs usuels (CoEx, … ) restent très macro et ne permettent pas d’identifier précisément les zones d’amélioration pertinentes, et nécessite une démarche plus fine.

La difficulté de la réflexion et de la démarche repose sur un paradoxe : les axes de travail sont communs à l’ensemble des banques : organisation , processus, IT, humain, mais doivent être déclinés dans le contexte propre de la banque pour être pertinents : positionnement marché/segmentation client, modèle bancaire (universelle, mutualiste, digitale), constitution réelle du portefeuille clients, stratégie de développement avec des impacts forts et critiques pour la banque, notamment sur le volet des ressources humaines.

La méthodologie et la vision de TNP

TNP évalue depuis plusieurs années les modèles d’organisation de plus de 40 établissements financiers (banque et assurance) européens et africains afin d’aider les dirigeants et leurs directions de la transformation et de la performance à identifier les bons leviers de performance.

Les principaux enseignements de ces travaux et de nos interventions montrent qu’il faut faire la chasse à certaines idées reçues : Il n’y a pas de solution absolue ou de modèle de référence à appliquer mais une instanciation contextuelle à opérer. Il existe toutefois un ensemble de bonnes pratiques et leviers à étudier et à intégrer au niveau de l’organisation de la banque, avec une approche différenciée dans les trois grands étages de celle-ci : organisation du siège, organisation des fonctions centrales, organisation de la chaine relationnelle et opérationnelle (Front, Middle, Back-Office) :

  • Au niveau des équipes siège : évaluation des fonctions de marketing, de distribution, d’animation commerciale, d’expérience client et de transformation (couvrant l’ensemble des projets Digitaux, Parcours, Data, Paiements, …)
  • Au niveau des fonctions centrales : deux grands modèles existent avec une prédominance pour le modèle centralisé (fonctions centrales de l’ensemble des métiers de la banque « Banque de détail », « Banque Privée » et « CIB » gérées au niveau de la structure de tête du groupe) par rapport au modèle décentralisé (fonctions déclinées et gérées au sein de chaque direction métier).
    • Principe général : une approche globale multicanale et multisegments est nécessaire avec articulation intelligente entre les canaux physiques/digitaux et CRC selon la segmentation client et la nature de l’interaction client (en temps réel ou temps différé).
    • Au niveau du réseau : évaluation du maillage (nombre d’agences par km2 et par habitants, nombre conseillers/ agence, nombre clients/conseiller, …), évaluation du span of control adéquat dans une logique de lean management.
    • Au niveau des opérations : organisation et rationalisation des middle et back office souvent très spécialisés et ne permettant pas une bonne mutualisation et partage d’expertise, pour des coûts par voie de conséquence très élevés.
    • Au niveau des centres d’appels : des modèles d’organisation type établis mais dont le positionnement/le métier peut différer selon le modèle distributif retenu par la banque : téléconseiller généraliste de premier niveau contre téléconseiller expert ou spécialisé en support des demandes complexes ou à fort enjeu (entrée en relation, crédits, IARD, …).

Bien évidemment, la performance de la banque ne repose pas uniquement sur la performance de son organisation et d’autres grands enjeux et défis doivent être adressés en même temps : développement d’une offre en lien avec les attentes clients, stratégie de conquête clients et développement mutlti-équipements (notamment en tant que bancassureur), intégration des nouvelles technologies, développement des enjeux RSE, développement sur le territoire et à l’international,… tout ceci dans un cadre règlementaire qui reste très riche et une compétition désormais mondiale. Un sacré défi !

Julien DuguéPartner