Un début d’année mouvementé pour Meta
Meta concentre l’attention en ce début d’année avec de nouvelles orientations politiques controversées. L’image du groupe de réseaux sociaux (Facebook, Instagram et Threads) se dégrade rapidement, or ni les évolutions sur la modération et le fact checking, ni les plaintes pour violation de droit d’auteur ne vont ralentir la chute.
Mark Zuckerberg a annoncé au début du mois qu’il allait dorénavant se passer des services des vérificateurs d’informations sur ses plateformes : « Nous allons nous débarrasser des fact-checkeurs » car « les vérificateurs ont été trop orientés politiquement et ont plus participé à réduire la confiance qu’ils ne l’ont améliorée, en particulier aux Etats-Unis ». La nouvelle méthode repose désormais sur les utilisateurs eux-mêmes, grâce à des « Notes de communauté », et les services internes de Meta pourront se concentrer sur la modération des contenus enfreignant les règles les plus sévères, selon leurs déclarations.
Les engagements de Meta pour la vérification des informations qui circulent sur ses réseaux pris au milieu des années 2010 se sont lentement érodés pour en aboutir à ce nouveau projet de « liberté d’expression ». Le programme de partenariat établi dans près de 200 pays en 2016 s’est vu retiré ses financements au fil du temps, et d’autant plus ces dernières années. De nombreuses sociétés de vérification d’information indiennes se sont déjà déclarées inquiètes, non seulement pour le climat politique, mais aussi pour leur avenir.
Concrètement, la montée progressive constatée ces dernières années devrait être plus brutale ces prochains mois sur la version américaine de la plateforme. Car outre les fausses informations, l’ensemble de la modération est « allégée », donc pour tous sur les contenus nuisibles et notamment les comportements haineux. Ainsi sortent du périmètre de la modération des messages racistes, misogynes, homophobes ou transphobes selon Wired et CNN qui ont analysé les dernières politiques mises à jour.
Les versions européennes des services Meta sont censées être protégées par le Digital Service Act, dont un des objectifs est de réguler les grandes plateformes numériques et de renforcer leur responsabilité face aux contenus nuisibles ou illégaux en ligne. Les dispositifs décrits par les textes sont clairs – transparence des algorithmes, accès des chercheurs et obligation de diligence – et les déclarations ne suggèrent pas une volonté de reproduction du modèle américain en Europe. En tout cas, Clara Chappaz, ministre déléguée chargée de l’Intelligence artificielle et du Numérique, semble confiante sur le respect des règles par Meta : « J’ai échangé avec la direction de Meta France ce soir qui m’assure que cette fonctionnalité ne sera déployée qu’aux États-Unis pour le moment. En Europe, le Digital Service Act sera respecté. Croyez en ma vigilance sur le sujet ».
Si la modération est effectivement un exercice périlleux car soumis à des contraintes culturelles et contextuelles fortes, sa suppression car les externalités négatives seraient trop importantes ne peut être une réponse satisfaisante pour autant. Les conséquences des harcèlements et propagations de fausses nouvelles ont été trop largement documentées pour éviter la question. Une étude menée par Pulse et Harris Interactive révèle que la méfiance des utilisateurs français des plateformes Meta envers les informations qui y sont diffusées s’est accrue et plus de 70% déclarent envisager de se détourner ou de boycotter les applications. Peut-être que la pression du consommateur fera infléchir la nouvelle orientation politique.
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