Véhicule électrique : think pink ?
Le véhicule électrique continue de faire les beaux jours de tous les prévisionnistes de la planète automobile. Et c’est le grand écart qui domine entre les électro-optimistes et les électro-sceptiques.
Certes plus personne ne doute de la montée du VE dans le marché mondial, ni du poids dominant qu’y prendra la Chine, ni du caractère incontournable de cette progression pour approcher les objectifs de réduction du CO2 et des émissions polluantes qui existent sur maintenant 85% de la planète.
Les game changers font aussi l’objet de consensus : densité et puissance des batteries, coût des VE à l’achat et à l’usage dépendant des volumes, importance du parc de bornes de recharge et temps de recharge. Et sur ces critères, les perspectives sont favorables : plus de 500 km d’autonomie dès 2022, arrivée de la batterie solide au milieu de la prochaine décennie, un VE au prix d’un véhicule thermique avant 2025, un temps de recharge en moins d’une demi-heure.
Mais alors, pourquoi de telles variations dans les prévisions ?
Une étude récente basée sur la demande spontanée de VE conclut à une part de marché en Europe de 30% en 2030 et 35% en 2035. Ces chiffres ne sont au niveau mondial que de 17 et 20%. En parallèle, le président de la World Electric Vehicle Association n’hésite pas à pronostiquer 50 % de part de marché en Europe dès 2025. Et le vice-président de Toyota, pourtant pas en retard en matière de véhicules électriques et hybrides et qui a ouvert largement l’accès à ses brevets se dit inquiet sur la capacité pour les constructeurs d’atteindre les objectifs 2025 imposés par les autorités et prévoit 50% de VE ou hybrides… pour 2030. Qui croire ?
Les fluctuations et la diversité des politiques publiques accroissent l’incertitude : les bonus-malus fluctuent au gré des contraintes budgétaires, les interdictions de véhicules polluants sont laissées à l’initiative des villes ou des régions, enfin le ban sur le diesel a pris par surprise les constructeurs et rendu impossible l’équation de baisse des effets de serre.
Difficile dans ce paysage de calculer la rentabilité des investissements nécessaires dans les batteries ou les parcs de bornes. L’automobile est devant une situation typique de la théorie des jeux : ne pas jouer l’électrique, c’est un risque de ruine, le jouer c’est le choix d’une rentabilité réduite à court terme alors que les dépenses de Capex n’ont jamais été aussi fortes.
Une certitude (si l’on ose) : la voiture de demain sera électrique avant d’être autonome. L’une est impérative et les clients y viendront, l’autre est une option qui n’a pas encore trouvé son marché.
Alors, le VE ? L’avenir est rose… pour le marché. Pour les effets sur le parc, il faudra encore attendre un peu !
Jacques Chauvet est Advisor de TNP depuis 2013. Ancien membre du Comité de Direction de Renault dans ses fonctions successives de Directeur de la Division Pièces et Accessoires, puis Directeur Commercial France, puis président de la région EUROMED et à ce titre président de Dacia, Jacques a ensuite dirigé le pôle de compétitivité MOV’EO.